La rentrée universitaire par temps d’épidémie s’organise sous le signe de la débrouille et de l’épuisement. Depuis le mois de mars dernier, le principe de continuité pédagogique nous enjoint à poursuivre normalement nos activités alors que la crise bouleverse nos pratiques professionnelles et notre vie hors travail. Nous acceptons depuis trop longtemps d’assumer l’augmentation continue du nombre d’étudiant.es, sans moyens humains supplémentaires suffisants. Pour nous qui travaillons déjà à flux tendu, les effets de l’épidémie et de sa gestion sont susceptibles de constituer un point de non-retour. 

Une augmentation criante des tâches logistiques. Le travail à distance génère une augmentation substantielle des charges administratives pesant sur les épaules du corps scientifique et académique. Trouver des locaux adaptés aux modalités pédagogiques choisies, admettre manuellement les centaines d’étudiant·e·s souhaitant être connecté.es à Teams, résoudre des problèmes informatiques ou de connexion… autant de difficultés exacerbées par l’éclatement des coopérations au sein des services. Les modes habituels d’organisation du travail cèdent peu à peu la place au règne de la débrouille.  

Pour l’équipement associé à l’exécution des tâches? Débrouillez-vous! L’employeur est tenu de fournir le matériel nécessaire à l’exécution du travail. La CGSP négocie actuellement une convention collective sur le travail à distance du personnel académique et scientifique, lorsque celui-ci est rendu obligatoire et ne résulte pas d’un choix. Les autorités ont pourtant, entre temps, libéré un montant de 300.000 euros pour couvrir les frais d’équipement de tout le personnel, à savoir bien moins de 100 euros par personne! Les Facultés en font les usages les plus variés en dehors de règles collectivement négociées: budget additionnel pour les services, remboursement de balles anti-stress, absence de communication claire… Pour le reste: débrouillez-vous, même si les autorités ont ponctionné, il y a peu, les petites réserves budgétaires dont vous disposiez! 

Demain, tous et toutes youtubeurs.euses? En mai, la CGSP avait symboliquement fait reculer les autorités sur l’idée, largement décriée, d’un passage obligatoire à l’enseignement hybride. Dans la pratique, les Facultés poursuivent des politiques variées avec, parfois, peu de respect pour la liberté académique du corps enseignant ou de considération pour leurs conditions de travail. L’idée de nous transformer en youtubeurs/euses a la dent dure. Les autorités ont ainsi soumis au Conseil d’entreprise de la rentrée un projet visant à modifier la définition de la charge de tou·te·s les membres du corps académique et scientifique en supprimant pour aujourd’hui et pour le futur toute référence à l’enseignement face à l’étudiant·e au profit de l’idée qu’enseigner consiste à être « en interaction » avec les étudiant·e·s. Nous nous sommes opposé·e·s à ce projet avec la dernière force. Si celui-ci devait être approuvé, vous aurez peut-être demain des collègues numériques lointains qui n’ont jamais mis le pied sur nos campus et qui ne prendront pas leur part au fonctionnement quotidien de l’Université. Là aussi, ce sera: débrouillez-vous! Et tant pis pour l’idée même d’université… 

Les autorités ne font pas une priorité d’aider le corps scientifique affecté par la crise!  Enfin, les autorités ont refusé de débloquer les ressources suffisantes pour prolonger de quelques mois le mandat des 65 membres du corps affectés par la crise sanitaire. Dans l’indifférence générale, plus de la moitié de la délégation du corps scientifique dans les organes centraux ont démissionné en signe de protestation. Pour les membres du corps scientifique pour lesquels l’aide allouée ne suffit pas, le message est le même que pour tout le monde: débrouillez-vous! Gageons que les négociations pour les aides de 2021 seront plus favorables…

Pour faire face à l’avenir, il est plus important que jamais pour nous de pouvoir compter sur une représentation syndicale forte. Les élections sociales du 24 et 25 novembre seront l’occasion de nous mobiliser. Quitte à nous débrouiller, on se débrouillera mieux ensemble. Vous pouvez consulter notre programme ici: https://cgsper.ulb.be/elections-2020/