Les chiffres utilisés pour cet article sont les chiffres officiels transmis par les autorités de l’ULB au Conseil d’Entreprise (CE) Intersièges du 13 Octobre 2022 (Annexe 4, Statistiques Personnels). Même s’ils sont encore erronés sur certaines données (notamment sur le nombre de mandataires FNRS), ils permettent des comparaisons sur les quatre dernières années. Rappelons que les annexes du CE sont publiques et accessibles à toustes les travailleur-ses de l’ULB.1

Le 9 juin dernier nous avons publié un article mettant en lumière l’état inquiétant de l’évolution du taux d’encadrement à l’ULB. Pour cet article, nous nous étions basé.e.s sur les données présentées dans les instances participatives. Suite à cette communication, les autorités nous avaient indiqué lors du Conseil d’Entreprise du 30 juin 2022 que ces chiffres ne pouvaient être utilisés pour faire une analyse sur plusieurs années car leur mode de calcul n’était pas uniforme, malgré une présentation identique. Quatre mois après, les autorités ont enfin fourni des statistiques fiables du personnel à l’ULB depuis 20182. Ces chiffres officiels ne font que confirmer l’évolution dramatique du taux d’encadrement à l’ULB que nous avions déjà soulignée ici: en seulement 4 ans, entre 2018 et 2022, le taux d’encadrement par étudiant-e a chuté de près de 20% pour le corps Scientifique et le PATGS3, et de près de 25% pour le corps académique4:

Figure 1: taux d’encadrement par corps et par année. Le taux d’encadrement est défini comme le nombre de travailleur-ses par corps pour 1000 étudiant-e-s. Voir notre précédent article pour une discussion sur le choix de cet indicateur.

En quantifiant cette perte relative de cadre en chiffres absolus, on réalise pleinement l’ampleur du problème : en raisonnant en etp5, pour revenir au taux d’encadrement de 2018 à la rentrée 2023 l’ULB devrait embaucher sur-le-champ 257 professeur.e.s6, 92 assistant.e.s7 et 323 personnels ATGS! L’urgence ressentie par nombre de collègues est donc bien réelle8.

Depuis 2018, l’embauche supplémentaire réalisée par l’ULB est, en etp, de 136,1 PATGS, 24,4 académiques et 28,7 assistant.es et assimilé.e.s, dont aucun.e assistant.e temps-plein9. Un ajustement insuffisant face au gouffre. La hausse du nombre d’étudiant.es offre pourtant des possibilités de financement au travers des recettes supplémentaires liées à l’augmentation correspondante de l’allocation de fonctionnement, des inscriptions et des aides à la réussite. En comparant les chiffres du budget ULB communiqués entre 2018 et 2022, il ressort que:

  • l’allocation de fonctionnement n’a cessé d’augmenter ces dernières années: dans le budget initial 2022, l’augmentation estimée est de 12.1 M€ en 2022, dont 4.5 M€ d’augmentation réelle, c’est-à-dire hors indexation. Cette augmentation réelle résulte pour 3,4 M€ d’une augmentation de l’enveloppe fermée faisant suite au refinancement de 2017, et pour 1,1 M€ de l’augmentation de la part de marché de l’ULB
  • le total des inscriptions a augmenté de 5M€ en 4 ans et est estimé à 21,2M € dans le budget initial 2022
  • enfin l’ULB a reçu 1,5M€ de subside « d’aide à la réussite » pour le budget initial 2022.

Les effectifs étudiants ont explosé ces dernières années, plus de 9000 étudiant·e·s supplémentaires en 4 ans, et le financement par enveloppe fermée10 n’a pas augmenté autant que le nombre d’étudiants (voir la figure 3 ici). Mais il a augmenté: une telle dégradation des conditions d’enseignement semble donc aussi s’expliquer par des choix politiques des autorités de l’ULB, qui possèdent une réelle marge de manoeuvre dans la gestion du budget. L’université investit des montants considérables pour le plan informatique digital@ulb (10,8 M€ sur 4 ans) et s’est engagée sur 19 projets immobiliers estimés à 154 M€ pour l’ULB. Nous attendons que des moyens équivalents soient mobilisés pour assurer des conditions de travail et d’étude décentes. Quelle meilleure aide à la réussite qu’un encadrement suffisant dans des auditoires à taille humaine ? Les incertitudes sur l’évolution des effectifs étudiants dans un contexte d’enveloppe fermée, souvent invoquées par les autorités, ne justifient pas tout : l’embauche d’assistant.e.s à temps plein est, par exemple, une mesure clairement finançable à court terme et d’importance capitale pour assurer la continuité et la qualité des enseignements.

La CGSP Enseignement Recherche réaffirme son attachement à un enseignement universitaire égalitaire et de qualité, ce qui passe en première instance par un taux d’encadrement élevé. Elle exige:

  • une embauche massive et immédiate de personnel à l’ULB pour soulager le manque criant de cadre dans tous les corps.
  • un refinancement durable qui garantisse l’accès de tous.tes à l’enseignement supérieur, en évitant la mise en place de toute forme de sélection à l’entrée des études. La solution structurelle à long terme aux problèmes actuels de l’enseignement supérieur en FWB est la fin de « l’enveloppe fermée » et de la mise en concurrence des Universités, qu’il faut remplacer par un financement de chaque université à hauteur de ses besoins. Il va de la responsabilité des autorités de l’ULB de prendre position et de s’impliquer dans ce sens.

Syndicalement,

La CGSP Enseignement Recherche

  1. Pour ceci vous devez vous rendre, via le site www.ulb.be, dans le Portail du personnel accessible par l’Intranet. Dans la section « Documents Officiels » cliquez sur « Instances participatives – Status et règlements »; choisissez « Conseil d’entreprise » parmi la liste d’entrées et enfin cliquez sur le lien « Procès-verbaux approuvés ». Ou sinon suivez ce lien (il faut accéder avec vos identifiants ULB).
  2. Annexe 4, Statistiques Personnels, au procès-verbal du Conseil d’Entreprise (CE) Intersièges du 13 Octobre 2022. Voir la note de bas de page ci-dessus pour comprendre comment accéder à ces chiffres.
  3. La diminution réelle pour le personnel Administratif, Technique, de Gestion et Scientifique est donc plus importante que celle que nous avions estimée en Juin 2022
  4. Bien que les chiffres fournis par les autorités concernant le nombre de mandataires FNRS assimilés au corps académique ne soient pas corrects, nous les avons utilisés tels quels par souci de cohérence. A ce sujet, il faut rappeler que bien que la contribution des mandataires FNRS soit substantielle (près de 3500 heures de cours données en 2021), elle est moindre, c’est normal, que celle des enseignant.e.s nommé.e.s au cadre de l’ULB. Le taux d’encadrement réel des étudiant.e.s est donc en réalité encore inférieur à celui que nous mesurons ici
  5. « équivalent temps-plein », qui équivaut à la charge d’enseignement d’un académique nommé à plein temps
  6. Terme que nous utilisons pour désigner les membres du corps académique nommé.e.s
  7. Par le terme « assistant.e » ici nous désignons les assistant.e.s, les assistant.e.s pédagogiques, les assistant.e.s chargé.e.s d’exercices (AEX) et les enseignant.e.s de langues vivantes.
  8. Remarquez que si on considère une période de temps plus étendue, comme nous l’avons fait ici, la chute du taux d’encadrement est encore plus marquée. Dans cette note nous nous limitons à la période 2018-2022 car les Autorités n’ont pas fourni de chiffres officiels avant 2018.
  9. À titre d’exemple, l’augmentation du cadre prévue au budget 2022 de l’ULB est, en etp, de 3 professeur.e.s, 7,5 assistant.e.s et 7,5 PATGS, pour un montant récurrent de 1.34 M€ sur base annuelle
  10. Voir notre précédent article pour une explication détaillée du financement du système d’enseignement supérieur en Communauté Française