Une crise… structurelle
Entre 2018 et 2023, le nombre d’étudiant·es de l’ULB est passé de 29 800 à 38 100, soit une augmentation de près de 30%! Comme nous l’avons souligné à de multiples reprises (ici ou ici par exemple), cette croissance massive ne s’est pas traduite par une augmentation suffisante de personnel enseignant et administratif.
Désormais, les étudiant·es doivent apprendre dans des auditoires surpeuplés, dans des groupes de TP trop grands, avec des enseignant·es peu disponibles et des secrétaires à bout de souffle. Pour le personnel débordé, les conséquences sur la santé au travail sont criantes. Nous avons relayé de manière répétée vos craintes et vos demandes auprès des autorités de l’université qui n’y ont répondu que très frileusement. En conséquence la situation reste intenable et il est temps d’y répondre de manière forte, tant pour les personnels, que pour les étudiant·es.
Des réponses insuffisantes malgré des marges financières
En réalité, pour les autorités, la situation ne semble pas réellement problématique —il faut dire que le niveau du taux d’encadrement leur était inconnu. Une fois les données du problème objectivées, on nous a opposé le coût d’un engagement de personnel à la hauteur des besoins.
La situation financière de l’ULB est pourtant relativement confortable. Les comptes de l’année 2022 se sont soldés par un boni de 17.600.000€ (sur un budget de 300.000.000€), ce qui porte le boni cumulé disponible fin 2022 à 26.000.000€.
Le budget 2023 prévoit de créer des postes supplémentaires au cadre : 18 ETP (équivalent temps plein) académiques, 10 ETP scientifiques et 6 ETP PATGS facultaires. Il s’agit d’une part de mesures insuffisantes pour répondre à la chute drastique du taux d’encadrement (cf. ici) et d’autre part du choix d’un engagement financier à long terme en privilégiant des postes académiques. Or, à de nombreuses reprises les autorités ont affirmé ne pas pouvoir engager à long terme, au risque de devoir procéder à des licenciements si le nombre d’étudiant.es venait à diminuer dans les années à venir (ce qui mènerait à une diminution de l’allocation de l’ULB). Quelle est dès lors la logique des autorités?
En réalité, ces décisions sont le reflet des rapports de force au sein de l’organisation de l’université et témoignent d’une vision particulière des missions d’enseignement à l’ULB, ainsi qu’une profonde méconnaissance des réalités et conditions de travail de nombre de nos collègues. A notre demandes d’augmentation du cadre, en particulier scientifique (assistant·es temps-plein), le Vice-Recteur à la prospective et au financement répond qu’il « doute de la popularité d’une telle mesure. Comment annoncer aux Doyens qu’au bout de six ans, tous les assistants recrutés en renfort devraient être supprimés ? » (Extrait du PV du CE Informations annuelles du 29 juin 2023, P.17)
Vraiment ? La CGSP ER serait curieuse d’entendre les doyen.nes prêt.es à refuser publiquement du cadre, même provisoire. Si c’est le cas, les corps académiques, scientifiques et administratifs de ces facultés apprécieront.
Quand au vice-recteur aux affaires académiques, il estime que « d’autres pistes sont sans doute envisageables, telles qu’une remise en cause de certaines pratiques d’enseignement par exemple. Les difficultés d’encadrement ne peuvent pas être résolues uniquement par des embauches supplémentaires. » (Extrait du PV du CE Informations annuelles du 29 juin 2023, P.17)
Comme si ça n’était pas déjà le cas! Depuis plusieurs années déjà, nous sommes nombreux et nombreuses à innover, échanger, bricoler,… et les programmes universitaires n’ont cessé d’être dégraissés et appauvris dans leur diversité. Mais dans un certain nombre de filières cela ne suffit plus. C’est un leurre de croire que les solutions technologiques les plus « innovantes » régleront les problèmes créés par un groupe de TP de 50 personnes et une erreur de penser que diminuer le nombre de cours diminuera le nombre d’étudiantes puisque cela fera juste plus d’étudiant.es par cours! C’est un pas de plus vers la dépersonnalisation de l’enseignement et la dégradation de la relation pédagogique. C’est un pas de plus vers la « chosification » et l’appauvrissement de l’enseignement. La suppression de cursus pointe pourtant comme un des futurs objectifs des autorités de l’enseignement supérieur. Nous reviendrons certainement sur cette volonté qui cache mal d’autres ambitions que celle d’améliorer le taux d’encadrement!
Une proposition réaliste : des assistant·es pour 6 ans
Face à l’urgence de la situation, nous proposons d’embaucher 50 assistant·es temps plein pendant 6 ans grâce au boni cumulé. Selon nos estimations budgétaires (réalisées à l’aide de la calculette mise en ligne par l’ULB), cette mesure coûterait 23.000.000€ répartis sur 6 ans.
Cette mesure permet de faire face à la croissance actuelle du nombre d’étudiant·es, sans engager l’ULB sur du long terme. En d’autres termes, si le nombre d’étudiant·es (et donc les ressources financières) venait à diminuer dans les prochaines années, l’ULB ne devrait pas supporter le coût de cette mesure au-delà de 6 ans.
Nous défendons l’embauche d’assistant·es et non d’AEX (hors contextes spécifiques où l’expérience de personnes exerçant hors de l’université représente une plus-value à l’enseignement). D’une part, parce que le statut d’assistant·es assure de meilleures conditions de travail au personnel. D’autre part, parce que les assistant·es temps plein sont dans de meilleures dispositions pour assurer un accompagnement des étudiant·es (transversalité de leurs charges, suivi sur plusieurs années, disponibilités étendues sur le campus) tout en assurant le lien fondamental entre enseignement et recherche.
Les autorités restent sourdes à nos propositions. Si nous voulons que cela change, c’est collectivement que nous devons agir en discutant entre collègues, en intervenant dans les conseils facultaires, en interpellant nos représentants dans les différentes instances (corsci, corps aca qui siègent au CA par exemple), en participant aux actions.