Contexte
La formation initiale des enseignant·es de l’enseignement maternel, primaire et secondaire en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) vient d’être réformée par le décret du 7 février 2019 (modifié en décembre 2021). Cette réforme entre progressivement en vigueur à partie de cette rentrée académique (2023-2024). Pour les sections 1, 2 et 3 (de la maternelle au secondaire inférieur), elle repose notamment sur un allongement de la formation d’une année. Pour les sections 4 et 5 (secondaire supérieur), la place de la formation à l’enseignement est renforcée (l’agrégation passe par exemple de 30 à 60 ECTS). La réforme ne s’accompagne néanmoins d’aucune revalorisation salariale des futur·es enseignant·es.
La réforme est organisée via des co-diplomations systématiques entre différents établissements d’enseignement supérieur avec des interventions des différents partenaires. L’ULB collabore avec 5 Hautes Ecoles, 4 Ecoles Supérieures des Arts et 1 Université.
Plusieurs dimensions de cette réforme préoccupent la CGSP Enseignement Recherche.
À l’échelle de la FWB :
1/ Un risque d’aggravation de la pénurie d’enseignant·es, significant une détérioration des conditions de travail et d’apprentissage. La FWB connait une situation de pénurie chronique d’enseignant·es. L’absence de revalorisation salariale malgré l’allongement de la formation pour les sections 1-2-3 (quatre années) ne peut que renforcer cette situation, ce que les premiers chiffres des inscriptions dans les départements pédagogiques des Hautes écoles semblent confirmer.
À l’ULB :
2/ Une gouvernance peu transparente. Afin d’opérationnaliser la réforme, l’ULB a fait le choix d’une structure appelée Pôle Education. Cette structure a pour mission d’émettre des avis, de coordonner les formations en section 4 et 5 (secondaire supérieur) qui sont dispensées par les facultés, mais aussi d’organiser la contribution de l’ULB pour les formations des sections 1-2-3 au niveau consortium Bruxelles-Brabant, en co-diplomation avec les trois HE partenaires. L’ULB intervient modestement dans les bacheliers (30 ECTS sur 180), mais significativement dans une vingtaine de nouveaux masters (30 ECTS sur 60). Le Pôle Education est administré par un conseil où siègent avec voix délibératives un coordinateur académique, les doyen.ne.s ou vice-doyen.ne.s des facultés concernées, et 1 ou 2 représentant.e.s désigné.e.s par ces mêmes doyen.ne.s. Les enseignant.e.s impliqué.e.s pour leur part sont cantonné.e.s à un Conseil de la Formation des Enseignants, sans aucun pouvoir décisionnel.
3/ Un manque de moyens cruel. La réforme s’accompagne de la création de nombreux cours pour lesquels des recrutements sont nécessaires. Les premières annonces des autorités de l’ULB sont particulièrement inquiétantes puisque les scénarios envisagés ont recours à un nombre considérable d’académiques à temps partiel et d’AEX. Du reste, aucune information précise n’a encore été communiquée. Quelles seront les conditions de travail de ces nouveaux collègues, d’autant plus que les nouveaux enseignements seront (presque) exclusivement donnés sur les sites des Hautes Ecoles ? Comment seront-iels intégré.e.s à l’université ? La qualité d’un enseignement universitaire repose sur un ancrage dans la recherche, les conditions envisagées permettront-elles aux collègues recruté.e.s d’en mener ?
En bref
Quel sens revêt l’implication de l’université dans la formation des enseignant.e.s si celle-ci ne joue pas le jeu d’une approche académique de la formation ? Si elle ne propose pas aux enseignant.e.s un cadre institutionnel et des conditions de travail qui le permettent ? Pourquoi co-diplômer avec nos collègues des HE qui ont développé de réelles compétences de formateurs/trices d’enseignant.e.s, compétences qui restent en partie à construire à l’université, si nous proposons un enseignement qui n’est pas à proprement parler universitaire ?